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L’ESSENTIEL By Vontobel

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18 août 2023 | 5 minutes de lecture

Gaz, croissance, devises… Ne ratez rien des principales informations macroéconomiques et financières avec L’ESSENTIEL by Vontobel.

Quoi de neuf

Gaz : Sobriété oui… mais pas seulement

À la sortie de l’hiver, les prix du gaz naturel ont continué́ leur décrue et ont atteint des niveaux bien inférieurs à ceux de l’année dernière. Une baisse des prix qui s’explique essentiellement par une réduction de la demande de gaz naturel en Europe mais également en Asie ce qui a permis au Vieux Continent de maintenir ses importations de GNL et d’assurer ainsi sa sécurité énergétique.

Une sécurité énergétique garantie d’autant que l’Europe, elle aussi, a baissé sa consommation de gaz naturel.  Un effort de sobriété fourni depuis cet hiver qui a porté ses fruits : selon les experts, les stocks sont remplis à près de 75 %, soit l’équivalent d’un mois et demi d’avance sur le taux moyen de remplissage. De quoi aborder le prochain hiver avec plus de sérénité́ surtout s’il est clément et si l’Europe reste économe.  

La prudence reste de mise

La France peut alors dormir sur ses deux oreilles ? Pas si sûr. Car les experts, eux, restent prudents. En effet, il est possible que les Pays-Bas annoncent, avant la fin 2023, l’arrêt définitif de l’exploitation du champ de gaz Groningen qui alimente l’Europe depuis 1963. Après un pic de production de 88 milliards de m3 en 1976, constituant une source d’approvisionnement majeure pour l’Europe jusqu’au milieu des années 2010, la production de Groningen est tombée à 57 milliards de m3 en 2013, puis à 4,8 milliards de m3  2023, suite aux tremblements de terre dans la zone d’exploitation. Si l’arrêt du champ est confirmé, l’Europe devra réduire encore sa consommation pour éviter de tendre un marché du gaz qui offre peu de nouvelles capacités pour les prochaines années. C’est donc acté : la guerre en Ukraine a rabattu les cartes de l’énergie en Europe. Le robinet russe, qui assurait 40 % des importations de gaz de l’Union européenne en 2020, est aujourd'hui fermé, obligeant les pays européens au-delà de la sobriété, à chercher des alternatives.

Relancer l’exploitation de gisements

L’Azerbaïdjan qui dispose de réserves de gaz pourrait être une source potentielle d’approvisionnements mais pas suffisante pour combler le manque russe. L’autre solution, serait de relancer l’exploitation de gisements, plusieurs pays d’Europe envisagent de suivre cette voie, comme l’Italie par exemple. Par ailleurs, dans les prochaines années, plusieurs nouvelles infrastructures de regazéification pourraient être construites, notamment en Allemagne. En France, le terminal méthanier de Fos-Cavaou va accroître ses capacités et une unité flottante devrait être installée dans le port du Havre.

Reste à savoir si ces pistes potentielles auxquelles s’ajoutent les énergies renouvelables, le nucléaire et le charbon - même si l'Europe a essayé d'éliminer progressivement le charbon pour atteindre ses objectifs climatiques, certaines centrales ont été relancées depuis mi-2021 en raison de la hausse des prix du gaz - suffiront à compenser l’abandon du gaz russe. Pour ce qui est du nucléaire, l'Italie ou les Pays-Bas reconsidèrent la possibilité d’y recourir mais le contexte pousse inévitablement à accélérer la transition énergétique vers les énergies renouvelables.

 

On en parle

L’investissement : le moteur des pays émergents

La croissance des pays émergents a plutôt bien résisté (+1,7% t/t au T1 2023) en début d’année grâce au rebond de l’activité dans certains poids lourds (Chine, Brésil et Pologne). Mais le ralentissement ne s’est pas fait attendre, notamment en Chine qui subit de plein fouet le freinage du commerce mondial comme le montre la dégradation de l’opinion des industriels concernant leurs commandes à l’exportation au T2. A cela viennent s’ajouter les effets retardés des durcissements monétaires de part et d’autre de l’Atlantique.

Pour autant, la récession semble écartée. La désinflation et le retour des investissements de portefeuilles ont permis une détente des conditions de financement pour les ménages et les entreprises mais également extérieures depuis le début de l’année.  

Quid de 2024 ?

Sans surprise, la vigueur de la reprise dépendra du contexte géopolitique au sens large (guerre en Ukraine, conséquences de l’affrontement commercial et technologique entre les États-Unis et la Chine) et de l’ampleur de la détente de la politique monétaire aux États-Unis et en zone euro. Mais pas seulement. Elle dépendra également de la capacité qu’auront les pays émergents à s’adapter au changement climatique et donc aux investissements de transition.

IDE dans les pays émergents…
Dans ce sens, le rapport 2023 de la Conférence des Nations-Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), concernant les investissements dans le monde, est plutôt rassurant. En Chine, les investissements directs étrangers (IDE) sont stables à 1% du PIB depuis 2018. Pour les pays émergents et en développement hors Chine, les IDE se sont très nettement redressés de +8% en moyenne sur 2020-2022 par rapport à la moyenne des trois années précédentes. 2022 a été une année record, les IDE totalisant 2,4% du PIB, un plus haut depuis 2012. Plus en détail :

Dans les principaux pays d’Amérique latine, ils atteignent 3,8% du PIB avec notamment un fort rebond au Brésil en 2021-2022 et 3,2 % du PIB en Europe centrale et en Turquie. Les investissements étrangers à destination du Moyen-Orient ont été très soutenus également, à 2,2% du PIB en moyenne sur 2020-2022 (contre 1,3% les trois années précédentes). L’Afrique reste le parent pauvre mais avec un tableau très contrasté : d’un côté, les pays non producteurs d’hydrocarbures dont les IDE se maintiennent (ils se sont même redressés en 2022 à l’image de l’Égypte et du Maroc, à respectivement 2,4% et 1,6% du PIB) et, de l’autre, les pays producteurs d’hydrocarbures dont les IDE ont stagné en 2022 sous l’effet du remboursement des prêts liés aux investissements (en Angola depuis 2016 et au Nigeria en 2022) et un quasi arrêt des investissements en Algérie. 

Toujours selon la CNUCED, les pays industrialisés d’Asie hors Chine (Corée, Hong Kong, Singapour, Taiwan) ont continué d’attirer le plus d’IDE : ils ont représenté, pour les quatre pays dans leur ensemble, près de 9% du PIB en termes relatifs, soit légèrement en deçà du record atteint en 2015.

…et plus de projets d'investissement « greenfield » à confirmer
Les projets greenfield hors Chine ont atteint l’équivalent de 2,5% du PIB en 2022, soit un retour à la situation pré-covid. L’Inde est le premier pays en nombre de projets et le deuxième en valorisations cumulées. Mais, par grande zone, contrairement aux IDE, c’est au Moyen-Orient et dans les pays d’Afrique non producteurs d’hydrocarbures que le nombre et la valeur des projets annoncés ont progressé le plus en 2022. En revanche, pour les pays à faible revenus, le compte n’y est pas. Reste que les projets d’investissements « greenfield » et leur impact sur la croissance sont encore à relativiser puisqu’il s’agit d’annonces qui restent à confirmer.

On retient

BRICS : un sommet pour renaitre de ses cendres

Désignant les principaux pays émergents, Brésil, Russie, Inde et Chine et South Africa, les BRICS deviennent officielles lors de leur premier sommet en 2009. Dès lors, elles poursuivent un double objectif : concurrencer le G7, et combattre l’hégémonie du dollar.

Mais 14 ans après, force est de constater que les BRICS ne disposent en fait que de 15 % des droits de vote à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international (FMI). Les raisons ? La difficulté à peser d’un seul bloc compte tenu des dissensions persistantes au sein du groupe, notamment entre la Chine et l’Inde. Mais le prochain sommet annuel des BRICS, qui aura lieu du 22 au 24 août en Afrique du Sud, pourrait les remettre au centre de l’échiquier international. D’abord, parce que, pour la première fois de l’histoire, la part des BRICS dans le PIB mondial dépasse celle du G7 (31,5% contre 30,7%) mais aussi parce que deux projets cruciaux pour les pays émergents seront débattus lors du sommet : l’élargissement du groupe à d’autres pays et la création d’une monnaie unique.

 

Rouble : à la peine

Au cours de la première semaine de juillet 2023, le seuil de 90 roubles pour un dollar, et de 100 roubles pour un euro, a été franchi pour la première fois depuis mars  2022. Certes, cette dépréciation a été accélérée par l’incertitude engendrée par la mutinerie du groupe Wagner fin juin, mais pour les experts, elle pourrait perdurer pour plusieurs raisons. D’abord, la fuite de capitaux qui s’est poursuivie malgré les restrictions imposées par la Banque centrale. Ensuite, l’assouplissement rapide de la politique monétaire russe entre mars et septembre 2022 qui jouerait désormais en défaveur du rouble. Enfin, les entreprises russes qui rapatrient de moins en moins de devises en Russie. 

Espagne : résistante

Le PIB espagnol a progressé de 0,6 % en rythme trimestriel au premier trimestre 2023, tiré par un seul moteur, la demande extérieure. Car la consommation des ménages reste plombée par l’inflation. Au deuxième trimestre, les données disponibles laissent présager que l’économie a continué́ à croître, mais à un rythme plus modéré́ sous l’effet d’un ralentissement dans l'industrie sous fond de demande intérieur atone. Dans les prochains mois, les experts tablent sur la résilience du marché du travail et le ralentissement de l’inflation pour réveiller la consommation des Espagnols.